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    Quelques jours de fort Mistral
    , un matin très gris au dedans, un peu comme chez Verlaine dont j'emprunte l'expression, les mots surgissent...

      Le vent cogne à ma fenêtre, pousse, secoue, fait trembler la barrière vitrée, rempart bien fragile pour de vifs assauts. Sa fureur grandit, sa voix enfle devant la résistance que lui oppose l’assaillie. En de violentes bourrasques de dépit sa vengeance se libère, s’attaquant aux timides rameaux, faisant s’enfuir à toute volée les petites pépites de mimosas, et périr les premiers vulnérables bourgeons.

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    Son déchaînement n’a aucun frein, aucune limite. Il lui faut une victime à sa mesure : Le pin, là bas, chenu, un peu penché mais encore heureux de pouvoir capter la lumière du haut de sa belle stature, de dominer ses jeunes congénères. Le vent, le vent méchant, concentre sa puissance et d’un souffle glacé, long, tenace, accompagné d’un sifflement moqueur, en César victorieux fait baisser la tête du vieil arbre jusqu’à terre, puis l’achève dans un fracas  de membres arrachés.
     

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    Le vent cogne à ma porte, pousse, secoue, fait tournoyer mes pensées comme feuilles noircies ; Vent exacerbé de la mémoire s’insinuant dans les interstices heureux du présent, pour en fragiliser l’apaisement ! Vent du grand large soulevant des vagues d’images, les projetant au regard du cœur pour les en retirer aussitôt en un reflux violent ! Le vent mauvais s’acharne sur mon esprit, sélectionne les armes qui font mal, m’entraîne dans une dérive épuisante.

      Ni portes, ni fenêtres, ne sont forteresse suffisante pour repousser de telles attaques ! La lutte est inégale : Se soumettre, attendre que, lassé, cet Attila immortel, choisisse une autre proie à détruire, tel est notre destin, tel est mon destin…


    LASIDONIE

     


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      Voici un court texte écrit pour un exercice d'atelier d'écriture : Dresser deux portraits, masculin, feminin, sur la base de points d'ancrage paralèlle à définir pour chacun, selon un questionnaire ( habitudes,goûts,passé,etc...). Mais ayant créé un dialogue d'échange entre les personnages, mon texte n'a pas respecté la consigne initiale. Par honnêteté envers la communauté je me devais, en ne le publiant qu'ici, tel quel,de le signaler.

    ELLE :


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    « Voyez vous je souhaiterai faire plus ample connaissance avant une rencontre. Ne pourrions nous pas nous écrire ? J’aime écrire. J’ai toujours dans mes poches un petit crayon. C’est si vite passée une idée, si furtive une senteur inhabituelle, si fugace la sensation d’un bien-être. Alors je note, au hasard, un coin de chéquier, un mouchoir en papier, tout me va.
    Non, je ne vous enverrai pas mes bribes chiffonnées, ni même un beau papier teinté à l’ancienne, au décor gracieux suranné, le clavier me convient aussi ! Tenez, je vais vous révéler un secret, un peu d’intimité en somme, juste pour nous rapprocher : J’adore me promener à pied puis rester en silence au bord d’une falaise qui domine la mer, assise à même le sol. Le contact de la terre, l’air chargé d’iode, et l’espace, l’espace à la fois reposant et inquiétant, évasion et mystère de l’inconnu.. Je fais régulièrement cet étrange rêve d’un chemin escarpé très pentu qui descend en serpentant vers l’océan, et m’entraîne en frôlant le vide. Le paysage sublime m’invite à défier le danger, exaltation et peur au ventre. Fascination et angoisse. J’aime cette dualité …Mais je m’aventure déjà dans les confidences, et en sais trop peu de vous. Restons, voulez vous,  « en surface »  (n’y voyez aucun jeu de langage de ma part, je vous prie). Aimez vous les chiens? »

    LUI :

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    « Faire connaissance ? Pourquoi dans ce cas ne pas se parler ? Bon, aujourd’hui, je veux bien écrire pour te répondre mais c’est tellement plus facile d’utiliser son portable, j’entendrai ta voix, tu découvriras la mienne. C’est révélateur une voix, tu sais. J’ai toujours avec moi dans ma poche ce bijou technologique irremplaçable, je fais tout avec, c’est mon appareil photo, mon mémo, mon horloge, mon ordi ! Sans lui ? Imagine- tu un monde sans contact auditif ? La parole a été donnée à l’homme ou plus exactement il l’a découverte, pour faciliter les échanges. Le « silence des espaces », pour ne pas reprendre un poète que vous, excuse moi, je mélange tu et vous, tu c’est plus simple, non ? Donc que TU dois aimer,  moi, ils m’effraient ! J’aime la ville et son fourmillement, là est la vie. Le pire de mes cauchemars, celui qui parfois me fait me réveiller la nuit je vais te le raconter. Puisque tu as parlé d’intimité, allons y : Je suis dans une ville que je ne reconnais plus, les rues en sont vides, je cherche mon chemin pour regagner ma voiture que j’ai garée quelque part--je ne me déplace jamais sans elle,  pourquoi se priver des facilités du progrès, et puis j’aime bien sentir l’odeur du cuir , les vibrations du moteur quand je la « pousse un peu »-- donc, je te disais, je cherche mais j’erre dans un dédale incroyable et, tiens-toi bien, personne, non, personne à qui demander un renseignement ! L’horreur ! Des sueurs froides !
     Tu aimes la dualité ? Je crois qu’entre nous elle serait importante ! On peut toujours essayer, tu m’écris, je te réponds par téléphone. C’est une solution, Non ?

    Au fait, oui, j’aime les chiens ».


    La typographie, que j'ai choisie différente, est aussi un reflet des portraits.

     

    LASIDONIE


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  • De l'humour en image, sur un sujet qui n'y prête guère, une façon de relativiser ?

    Fatigué !


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    Combien de fois entendu, prononcé, cet aveu de lassitude qui s’empare des corps, des esprits, ou des cœurs, d’impuissance devant l’incontrôlable, sorte d’engourdissement qui, à des degrés divers, fait souffrir. Car toute une gamme de sensations s’exprime à travers ce seul mot.

     "Je suis fatigué", dira celle-ci,  celui-ci, en rentrant après une longue journée passé hors du chez soi, simple constat du poids pesant sur les épaules qui s’allège au fil de la soirée.

     "Je suis fatigué", dira cet autre, après un effort physique, sport, activité de loisir soutenue. Un bon fauteuil, du  repos, le bien-être remplace peu à peu la sensation désagréable.

     "Tu me fatigues ! " Exclamation d’énervement de la maman surmenée, dont l’esprit rejette cris ou agitation de ses bambins, fatigue qui peut devenir de l’exaspération lorsqu’il s’agit de tenir la bride à des adolescents exigeants, ou faire face à un conflit verbal avec un partenaire.

     "Tout me fatigue", soupire celui, celle, dont les pensées tournent à vide, incapable d’accrocher un regard de plaisir dans son univers. L’esprit engourdi s’endort dans le désintérêt passif, puis, un jour, une lueur…

     "Comme je suis fatigué ! " Expression du ressenti de celui, celle, que la maladie a pris pour cible, corps abandonné au mal, qui peine à résister, mais qui vaincra.

     Fatigues murmurées, ou clamées, sont comme à demi soulagées par cet aveu, sorte d’appel à l’écoute, des autres, de soi-même.

     Mais combien plus grave, plus douloureux le « je suis fatigué » intériorisé, un « je n’en peux plus » des cœurs, déçus, désespérés, ballottés dans leurs contradictions, prisonnier d’une souffrance morale qui les prive de toute joie, de tout avenir ! Un mot griffonné un jour, sur une table de chevet, avant le grand départ…

     

    Souffrance des corps, souffrance des âmes, tant de choses dans ce mot banal :  

    FATIGUE…



    LASIDONIE

     


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    Laisser exister le chagrin retenu, dénouer le nœud qui entortille l’estomac, vrille l’esprit, obscurcit les minutes qui lui échappent, imperturbablement martèlent les distances d’avec ce que sa raison,  son cœur refusent d’assumer, qu’elle voudrait retenir…Oh ! Dire !

    Elle aurait voulu couvrir le  papier de ces mots qui l’étouffent, qu’elle doit contenir : les écrire serait donner vie à ce qui ne peut, ne doit pas exister ailleurs que dans le secret de la pensée. Alors, seulement, être capable de décrire ce mal qui dés le réveil, quel qu’en soit le moment, nuit noire ou petit jour, mord, envahit la poitrine, chemine dans la gorge, fait plisser le visage et se répand entre les paupières fermées. Banalité de l'expression populaire « verser des torrents de larmes » ! Pourtant ce qui se fraie un chemin du cœur aux yeux, qui échappe à tout contrôle, toute volonté, secoue tout le corps, ressemble bien à cette eau dévastatrice charriant avec elle débris des rêves morts ou bientôt morts.

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    Ce n’est pas une eau claire, purificatrice, celle  qui s’enfonce, absorbée par les profondeurs, nourriture d’une terre qui renaîtra, revivifiée. Non, c’est une eau grise sans cesse alimentée par un tourbillon d’images, un passé toujours présent en soi qui ne veut pas céder la place. Elle en a mal à en crier, sa pensée s’anéantit dans les sanglots, le vide s’installe. N’existe que la sensation d’être tout entière contenue dans ce flot qui s’échappe, cogne, secoue le corps recru de fatigue, recroquevillé dans son repli du monde, fœtus refusant la vie. Par instants la lucidité revient, si pitoyable, affaiblie, confrontée à l’absurde : Rien ne pourra changer de ce qui est. Sa mémoire semble assoupie, compatissante. Un répit… Quel leurre ! Un écho soudain : mot, bribes de musique, couleurs d’une image, redonnent au torrent toute sa force, sa violence. Dormir, dormir, elle l’appelle avec désespoir le sommeil, le supplie de la guider hors des frontières de cette douleur qui n’en finit pas, vers le noir absolu, le trou noir avaleur d’étoiles...

    LASIDONIE
    6-12-07

     


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  •   Un deuxieme volet, de réflexion cette fois ci :



      Il se produit dans toute existence un moment, « tôt ou tard » où sans qu’on le veuille la pensée se pose sur ce que l’on a réalisé, ce qui a échoué.

    Je n’ai pas échappé à cette règle !


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      Ce que je considère comme un échec dans ma vie ---qui n’en n’a pas eu --- : l’incapacité de balayer le ''un peu tard,''trop tôt ou'' très tard.''  Pourtant depuis cette mésaventure d’enfance que j’ai évoquée dans un court récit  (voir ‘l'’horloge  et la petite fille’’ )  j'essaye d'être "à l'heure" !

    Mais Noël, la fête, allez vous dire, vous aussi, ce n'est pas l'heure pour ce genre de prose !
    Si c'était justement un temps de réflexion,  de " bilan" ?
    Je me suis rendue compte que, pour moi, il est souvent  « trop tôt, trop tard ».

    Téléphoner à des amis ? Des parents ? Tard ! Pas le moment !

    Rendre une visite ? Heure peu propice, un peu tôt.

    ***Se rendre au restaurant , à une invitation ? Pas juste à l'heure, trop tôt ! et surtout pas trop tard...

    ***Avoir une discussion lorsqu’il y a conflit ? Très, très, tard !

    ***Rattraper les choses incontrôlées, les erreurs désagréables, modifier les situations enkystées ? Beaucoup trop tard !

     
     

    Paralysie de l'horloge ou ...peur du contact !

     

    Pour beaucoup l’heure n’est jamais un souci, les rapports avec les autres sont ainsi bien plus simples !

    Pour ma part j’ai pris conscience trop tard de ce que je pouvais être –je ne peux dire « ce que je suis » tant il est difficile de se cerner-- de ce que j'aurais voulu pour mon devenir ; J’ai su trop tard ce qui fait l'unique prix de l’existence et désormais il est beaucoup trop tard pour faire en sorte de l'obtenir !

    La meilleure des épitaphes pour me résumer serait :

    '' Même toi, ô mort, tu es arrivée tard.''   

    Et ce, quelle qu’en soit la date, tôt, ou tard… 

      

    Un peu de clarté amère envers soi-même, il arrive que l’on en soit capable  :  n’avoir pas su choisir, discerner, la bonne heure.

    Comme l’a écrit Flaubert "le meilleur de la vie se passe à dire il est trop tôt, puis, il est trop tard’’.

    Le meilleur est passé, l’heure ne compte plus, la présente si peu, il est un peu tard pour l’avoir admis ! Mais pour finir sur une pirouette de clown triste--les clowns sont rarement gais : Encore un peu tôt pour un bilan final ….Et tard pour mes yeux fatigués..

     

     

    LASIDONIE

     

     

     


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     Texte que certains ont pu lire, paru en Avril dans l'atelier " Papier libre". Je le remets ici comme premier volet de mes pensées sur le temps.



    L’horloge implacable

     

     

     Pourquoi soudain cette image à la mémoire ? Quel étrange phénomène déclenche-t-il cette bouffée de sueur qui monte le long de mon visage ? Une association, deux mots, «  peur d’enfants. ». Pas de sorcières, ni de loups, dans ce flash, juste une petite fille de 8 ans, éperdue.

     

    C’était un matin  pas comme les autres, un petit bout de chemin à pied pour prendre le tramway qui devait me transporter au terminus, un autre long chemin en ville ensuite pour rejoindre l’école. Maman, occupée par ma toute petite sœur, m’avait un jour signifié que désormais j’étais assez grande pour faire le trajet seule. Avec papa, nous en avions bien balisé les étapes. J’étais à la fois fière et angoissée de me lancer dans cette aventure. Je regardai défiler les maisons sur cette longue avenue plongeant vers le centre, impressionnante déclivité que le tramway en multiples secousses franchissait dans des bruits grinçants. Brusquement un crissement aigu, quelques sursauts, panne de circuit. Nous étions encore loin de l’arrivée et il me restait un bon quart d’heure de marche supplémentaire.

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    Etre en retard ! Ma hantise,  j’allais être en retard, et mlle Lecoutre, vieille fille revêche, sèche, au chignon serré dans la nuque, allait me gronder devant toutes les autres, me punir ! Je voyais la baguette levée, je sentais le sang battre mes tempes ! Non, je ne pouvais pas attendre là. Certains voyageurs descendaient, j’en fis autant. Et sur ce long trottoir pentu, interminable, je me mis à courir, courir, pouls accéléré, une seule pensée en tête, être à l’heure ;  les jambes molles finirent par lâcher et je m’étalai de tout mon long. Comment décrire cet affolement, ce drame qui se jouait là dans ma tête d’enfant. Mes genoux étaient en sang, mes coudes râpés, je me mis à pleurer en silence. Un profond sentiment d’abandon, de solitude immense, m’étreignit mêlé à la peur tenace de ce qui se passerait à mon arrivée en classe. La concierge d’un immeuble m’avait vu, me proposa son aide pour me soigner,  ramasser mon cartable éparpillé. Dans un sanglot je ne pus que lui dire, «merci,  je me suis fait mal, je me suis fait mal, je vais être en retard » Parler, se plaindre auprès de cette femme c’était échapper à l’isolement, à l’angoisse d’une petite fille affrontant seule une situation effrayante inconnue. Cette présence, une parole de compassion, me donnèrent l’énergie pour reprendre ma course. En sueur, la gorge nouée, oubliant les brûlures de la peau arrachée, essoufflée, je dus , pour pouvoir y pénétrer, sonner à la lourde porte du pensionnat,  école stricte, à la discipline sévère. Il me fallut expliquer, debout devant les élèves, les raisons de mon retard, mais par fierté je dissimulai ma frayeur et mes blessures. J’eus droit à un sermon, mais la punition me fut épargnée.

    J’en fis le récit le soir à mes parents, tremblant d’émotion contenue, avec en pensée les sursauts du tramway, son arrêt brutal, ma chute ! Je  me couchai ensuite et je tombai dans un de mes sommeils épouvantables peuplé d’horloges, de visages austères et répressifs, de bruits métalliques,  dont je fus tiré au bout de deux heures environ par une secousse plus affreuse encore que celle du matin : Je venais de voir atterrée, l’engin, mû par un sursaut électrique, passer sous mes yeux, crissant, avalant la pente sur ses rails, s’enfoncer dans cet entonnoir de rue, emportant à folle allure les passagers. Glacée,  j’entendais, le monstre gronder,  narquois : «fallait pas descendre, idiote,  tu seras en retard, tu seras en retard ».

     

    Le tic, tac, de l’horloge est en moi...pour le dernier rendez-vous…

     

    LASIDONIE 10-04-07

     Un deuxième volet , demain, celui de la petite fille devenue adulte dans le dernier quart...d'heure de sa vie.

     


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  • Participation à l'atelier " d'écriture ludique " du 10 au 24 -11
    Exercice proposé par "Michel-Faux Réveur"


     

    Mots à insérer , sujet libre :

    page - annuler - travers - crépuscule - tirer - facile - ambiance - hypothèse - mésange -finesse - parallèle - absurdité - sonate - langage - puriste - fatalité - dissoudre - pyramide -caresse - victime - bâtisse - perpétuel - exécrable - hacher – cran.

      

     

    Il faisait froid, très froid, un vent glacé secouait les feuilles sans vie des palmiers, les plaquaient contre les troncs écornés aux pelures tristes, hachées. Fatalité d’un été, d’un automne très sec, les palmes couleur terre avaient été sectionnées.

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    Au travers des vitres de ma voiture garée en bord de mer, je voyais les gros rouleaux en un perpétuel va et vient se soulever, grossir, et telle une chevauchée éperdue, galoper vers la rive, s’écraser, se dissoudre parmi les gravillons et les galets. D’anonymes victimes emportées par leur violence se trouvaient projetées sur le sable, flacons, mégots, papiers, résidus des promeneurs exécrables, peu respectueux de la beauté des sites naturels. Connaissaient-ils, ces malotrus, le langage du vent, de la mer, du soleil et des orages, Appréciaient-ils la caresse  de la brise du crépuscule sur les visages enfiévrés de l’été ? Sauraient-ils seulement s’attarder sur la mésange posée sur la haie ? Quelle absurdité d’imaginer la main lâchant sans honte la canette vide sur le sable, ayant en parallèle la finesse de l’écoute, du regard qui aime ! 


    Ma pensée cheminait dans le sifflement du vent que je percevais depuis l’intérieur de l’habitacle. Mes yeux ne lâchaient pas les pyramides salées qui en un instant s’érigeaient pour  s’écrouler en rides crantées. Bâtisses éphémères, plus fragiles que celles solides, triomphantes du désert ! La main des hommes avait été plus ferme que celle de la mer déchaînée.
    Dans cette ambiance fascinante, faite de tourmente, de celle qu’on peut admirer de loin, quand on est bien à l’abri, curieusement s’éleva la voix contrastée d’un instrument : la radio transmettait la sonate pour piano de Beethoven " Clair de lune". Enchantement de la musique qui me tira de ma contemplation marine. Un autre de mes sens était sollicité et je me laissais aller toute entière aux vibrations intérieures qu’il suscitait. C’était facile d’annuler toutes les idées qui fourmillent quand l’esprit baguenaude, il suffisait de fermer les yeux et d’ouvrir son cœur pour rentrer en communion avec les interprètes, imaginer les émotions du compositeur. Je ne suis qu’une béotienne, peu apte à juger en puriste de la qualité de telle ou telle grande formation musicale, mais là, en cet instant, ce fût fabuleux. Peut-être était-ce dû au contraste entre le furieux des éléments à l’extérieur, et dans mon cocon de métal, les sonorités mélancoliques du piano qui les accompagnait. Hypothèse d’un esprit rêveur ! La vitre un instant baissée me renvoya des odeurs indéfinies d’eau salée, d’algues humides, d’iode. La page du livre apporté était restée inerte sur le siège passager, inutile. Dans mes narines, à mes oreilles, sous mes yeux, là était le rêve…
                                                                                                                        

     

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    15-11-07

    LASIDONIE

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  • ....elle en avait été à la fois heureuse, et inquiète sans trop savoir pourquoi.

    IMG-1489-soir-sur-l-eau.jpg



      Les yeux de Lulu  s’attardaient sur l’horizon, il ne restait plus que quelques traînées rosées dans un coin de ciel de plus en plus sombre. La traîne ! Le battement sourd qui s’était apaisé reprit de plus belle, scandé par le sang qui affluait, semblait se répandre jusque sur son visage. La traîne, la robe de mariée, premier choc, première décharge d’adrénaline. Il avait voulu l’accompagner, elle ne le voulait pas. «  Superstition absurde, avait-il dit, sur un ton péremptoire, histoire de bonnes femmes d’un autre temps, Lulu, on est au XXème siècle, le temps des jeteuses de sort est terminé, allez, donne moi le numéro de téléphone, nous aurons ainsi tous les renseignements pour situer la boutique. » Lulu avait fini par trouver inutile de lui tenir tête, il montait le ton, elle n’aimait pas çà, ni le bruit qui vibrait dans sa poitrine. Dans son émoi elle lui donna un mauvais numéro. Bien évidemment l’occasion de laisser déverser sa fureur lui était servie sur un plateau ! «  Pourquoi mentir, tu ne vois pas à quel point tu es stupide, cette robe est un prétexte, au fond tu ne veux pas m’épouser, c’est çà, n’est ce pas, allez dis le, mais dis le donc ! ». Elle se revit, en larmes, incapable de prononcer une parole. Damien était subitement quelqu’un d’autre, un inconnu qu’elle regardait s’agiter, crier et qu’elle avait envie de fuir. Pourtant elle n’avait pas bougé ! L’eau calme le feu, ses larmes avait interrompu le déferlement de mauvaise humeur, Damien l’avait prise dans ses bras «  Mon amour, ma douce, pardonne moi, je t’aime tant, tu es mon poisson de lune, mon unique, mon toujours : là, ne pleure plus, tu iras seule, où tu voudras, je t’attendrai à l’extérieur ». Lulu entendait ces paroles comme si la voix de Damien lui parvenait de loin, rythmée par les boum, boum, boum, plus affaiblis de son cœur. Pour la détendre il avait fait le pitre, lui avait  pris le chapeau de paille un peu défraîchi par les longs après midi  d’été passés au bord de l’eau, s’en était affublé en le déformant «  Ils font les mêmes pour les hommes ? ». Elle n’avait pu s’empêcher de rire et de lui pardonner !

      La nuit tombait peu à peu ; la plage n’était plus qu’un étang noir, presque sans vie, animé parfois d’un bruit furtif celui de l’écume légère provoquée par la barque d’un pêcheur, ou le clapotis  apaisé du ressac sur les galets. Lulu  aimait tout particulièrement cet instant suspendu entre chien et loup, demi teinte d’ombre, où les formes des choses perdaient de leur épaisseur, mais restaient encore perceptibles. Une sorte d’état de semi conscience, celui qui précède le sommeil profond, le moment des songes éveillés. Instants privilégiés où l’imaginaire cherche à percer le secret de la vie, de la mort, de la disparition de Damien la nuit de la St Jean. Lulu connaissait le secret : Il l’avait abandonnée avec leur petite Emilie pour un joli jupon tout neuf. Mais elle avait préféré dire à sa poupée de 3 ans « papa est parti pour son travail loin, très loin, mais il nous aime »  Elle frissonna soudain, ce diable de bruit resurgissait en elle…Elle se leva, tourna le dos à la mer, et lui abandonna ses souvenirs. C’était il y a longtemps, pensa lulu, «  ce soir le soleil a été magnifique »… 

                                                                                                                                                                             20/10/07

     
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    LASIDONIE

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