Quelle quiétude, pensait-elle ! Me voici enfin seule loin de la cohorte envahissante de mes congénères, cols-verts, poules d'eaux à
bec jaunes, attirés par le pain des hommes ! Fiévreux les hommes ces temps ci comme toutes ces mouettes et pétrels qui sans cesse tournoient, s'agitent, enfin partis ! Me suffit, la
nourriture du lac, nul besoin des humains ! N'est-il pas merveilleux de se laisser porter en silence par ce miroir flottant plutôt que de se précipiter vers les rives où les promeneurs
curieux attendent ? Aucun effort, simplement observer le spectacle offert par les feuillages : De vrais Narcisse, qui s'admirent dans cette glace généreuse ! J'écoute le vent malicieux qui se
plait à en déformer l'apparence ! De troublantes arabesques naissent autour
de moi, reflets en chevelure éparpillée des frondaisons sèches ou filet écorché que je me plais à redessiner d'un coup de palme. Le soleil a cédé sa place, tout se calme, bien-être ! Pas de
calendrier à honorer !
C'est moi, la vieille oie, la sage de ces lieux, encore fière de sa rouge parure, qui vous le dit : Ici et maintenant, c'est le paradis...
Quel sot a dit "bête comme une oie ?"
LASIDONIE